Demain les Chats, de Bernard Werber

Un peu d’imaginaire et de science-fiction française! Cela fait toujours plaisir de souligner les références du genre, venues de notre cher pays! Un de mes articles précédents était d’ailleurs la critique de La Horde de Contrevent, de Alain Damasio qui, pour moi, a été l’un des écrits les plus novateurs que j’ai eu l’occasion de lire. Donc, il n’y a pas que les anglo-saxons qui peuvent nous faire rêver et nous emmener dans des histoires complètement invraisemblables.

Et, bien sûr, Bernard Werber, qu’on ne présente plus, fait partie de ces auteurs références.

Alors, je vais être honnête, j’en attendais beaucoup de ma lecture de Demain les Chats. J’ai même mis pas mal de temps avant de me lancer…

Pourquoi?

Il s’agit en fait du deuxième livre de Bernard Werber que je lis. Le premier étant son célèbre “Les Fourmis”… que je n’ai pas du tout aimé. J’ai vraiment eu du mal à m’accrocher, à comprendre les tenants et les aboutissants de l’histoire. Je n’éprouvais absolument aucune empathie pour les fourmis de l’histoire (s’il avait pris un autre animal, peut-être cela aurait été différent?) et j’ai trouvé la fin complètement tirée par les cheveux.

Bref, ça ne commence pas super bien avec Bernard Werber. Alors que la majorité des personnes que je côtoie (et qui lisent) ne tarissent pas d’éloge sur l’auteur, j’étais un peu perplexe sur ce qu’ils trouvaient de bien dans ses histoires.

Dans ma bibliothèque, j’avais un exemplaire de Demain les Chats et, je me suis dit que j’allais donner une seconde chance à Bernard Werber… Et, devinez-quoi? J’ai bien fait!

L’histoire est celle de Bastet, jeune chatte d’appartement qui vit avec sa maîtresse dans Paris. On suit son quotidien, ses réflexions, sa relation avec “sa servante” humaine… Puis, un jour, de nouveaux voisins viennent s’installer devant chez elle. Ils possèdent un chat, Pythagore, qui a la particularité d’avoir une sorte de port USB sur le haut du crâne, lui permettant d’accumuler plein d’informations sur les humains. Une relation “élève-professeur” va naître entre les deux chats et Bastet comprendra de mieux en mieux les comportements de plus en plus violents des Hommes. Car, si au début du livre, on assiste à un attentat (à travers le regard d’un chat) dans la rue, la situation empire jusqu’à ce que tout Paris soit dévasté. Bastet, Pythagore et d’autres chats devront se réunir et s’allier aux humains pour survivre.

J’ai lu ce livre d’une traite. Le rythme y est excellent et chaque chapitre apporte son lot de rebondissements. Si, au départ, on peut penser que le roman tournera autour de l’appartement, de la connaissance des humains par les chats, Bernard Werber brise assez rapidement cette perspective et nous emmène dans un Paris dévasté par la peste et les rats, avec des batailles épiques. Un vrai bon moment!

Les personnages sont très bien travaillés également, nuancés. Bastet, avide de connaissance avec la volonté permanente de se faire comprendre de son humaine, y est aussi dépeinte comme hautaine, à qui tout lui est dû. Étant la narratrice, on comprend bien sa psychologie et l’envie de marquer et conquérir son territoire. Werber jongle habilement entre des sentiments qu’on pourrait qualifier d’humains (la jalousie, le doute, la colère…) avec des émotions animales banalisées. Par exemple, Bastet se donne volontiers à tous les mâles qui veulent bien, et, dans la narration, sans aucun jugement de valeur. C’est juste comme cela qu’elle vit. Réflexions humaines et pulsions animales sont savamment mélangées pour permettre aux lecteurs de plonger dans le quotidien et dans la psyché de ces félins d’appartement.

Le personnage de Pythagore est très intéressant aussi. Grâce à toutes les informations qu’il a accumulées avec son port USB (Bernard Werber nous fait passer des objets connectés aux animaux connectés), ce chat se comporte tel qu’elle. On apprend pendant le roman comment il a obtenu ce “pouvoir” qui va faire de lui le félin le plus humain. Il refuse de se soumettre à ses pulsions animales, malgré l’insistance de Bastet, pour se focaliser sur l’acquisition de connaissances. Étant connecté à Internet tout le temps, il engrange énormément d’informations sur l’Histoire, et notamment sur l’évolution de la place des chats dans la société, depuis l’Antiquité. Pendant presque tout le livre, Pythagore nous apprendra que les félins furent tantôt divinités, tantôt protecteurs, tantôt parias. Bastet voudra d’ailleurs réhabiliter les chats afin de leur rendre leur vraie place de dieux. Pythagore, grâce à sa connectivité, permettra de mener la guerre aux rats en ces temps apocalyptiques, en aillant accès aux caméras de Paris, à des cartes…

S’il fallait une critique, je dirais que, justement, la connectivité de Pythagore est un peu trop puissante. Qu’une connexion internet lui fasse bénéficier de tous les accès de tous les sites ultra-protégés du gouvernement français me semble un peu incohérent, même pour de l’imaginaire. Aussi, admettons que sa connectivité soit tellement sophistiquée qu’il peut hacker ce qu’il veut, pourquoi le recharge-t-on avec un port USB? Aujourd’hui, les clés USB sont quasiment obsolètes (et on n’a pas encore de chats connectés). Je pense que Bernard Werber aurait pu aller plus loin dans l’anticipation et trouver un moyen plus moderne et futuriste pour que le chat obtienne toutes ces informations.

À part ce point-là, Demain les Chats vous fera passer un vrai bon moment. Des rebondissements, des réflexions sur la vie, des combats, un peu de magie aussi… à travers le regard d’un chat, cela vaut le détour. Je vous conseille fortement ce livre… qui vous fera ronronner de plaisir!

Demain les Chats, de Bernard Werber
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