Une expérience de lecture géniale. C’est la première fois qu’un roman de SF m’a fait ressentir une telle empathie pour un personnage. Il y a une vraie dimension dramatique dans ce livre, qui en fait un ouvrage hors des cases habituelles de la science fiction. Un livre culte qui vaut le détour!
Charlie Gordon, jeune homme attardé mental, travaille dans une boulangerie et suit des cours spéciaux à l’université. Grâce à sa professeur, il est approché par deux scientifiques qui lui proposent de servir de cobaye humain pour une opération du cerveau qui permettrait d’obtenir de grandes capacités intellectuelles. Une souris de laboratoire, nommée Algernon, a été le premier cobaye et tout porte à croire qu’elle a développé de nouvelles facultés. Charlie accepte et se faire opérer. Son QI augmente drastiquement et, plus il gagne en intelligence, plus il se rend compte des traitements qu’il a reçu par sa mère, qui l’a rejeté à cause de son handicap, ou par ses collègues de la boulangerie, qui se moquent constamment de lui. Le récit sera focalisé sur la compréhension de son passé, son appréhension du présent et le changement de ses relations sociales, dû à son intellect grandissant. Malheureusement, Charlie se rendra compte que Algernon perdra progressivement ses facultés mentales et comprendra que son destin sera similaire. Il travaillera alors pour déterminer pourquoi et comment lutter contre la dégénérescence qui l’attend.
Avant ils riaient de moi, me méprisaient pour mon ignorance et ma lenteur d’esprit. Maintenant, ils me haïssaient pour mon savoir et ma facilité de compréhension. Pourquoi cela mon Dieu ? Qu’auraient-ils voulu que je fasse ?
Comme je l’ai écrit plus haut, ce livre m’a troublé. Déjà, il a la forme d’un journal de bord dans lequel Charlie écrit très régulièrement. On se rend d’autant plus compte des progrès intellectuels car, au début du journal, le style est “enfantin” avec des phrases très courtes, beaucoup de fautes d’orthographes (ce qui n’est pas évident pour le lecteur…), de répétitions, un vocabulaire trivial… puis, au fur et à mesure, le style s’améliore jusqu’à devenir un journal scientifique dans lequel Charlie relate ses constats, ses réflexions sur la vie, sur son état… Ce procédé stylistique nous embarque complètement. Nous sommes plongés dans la vie du jeune homme et sommes témoins de ses progrès intellectuels puis, par la suite, de sa déchéance. Toutes ses émotions, ses frustrations, ses questions sont ressenties par le lecteur. Keyes réussit à nous transmettre tout cet amas émotionnel qui croît en Charlie. On se prend d’une grande pitié pour ce jeune homme qui vivait dans la plus grande naïveté, dans un monde où tout est beau et tout le monde est gentil, puis qui, suite à l’opération, découvre à quel point la vie a été difficile pour lui et l’être humain condescendant ou moqueur. La fin, que je ne dévoilerai pas dans ce post, n’est pas des plus joyeuses…
Même si on sent la fin inévitable arriver, tout au long du livre on espère que Charlie trouve une solution à sa dégénérescence. Le suspense est là et prenant.
Si vous voulez lire un livre parmi ce qu’on fait de mieux dans la SF, en voici un qu’il faut inclure tout de suite dans une PAL!