1984, George Orwell // 2084, Boualem Sansal

Lecture comparée

Je me suis prêté à l’exercice de comparer 1984 de George Orwell et 2084 de Boualem Sansal… Et c’était super!!

Les deux livres parlent du thème de totalitarisme (politique pour 1984, religieux pour 2084): sa naissance et sa façon de perdurer. Le héros de chaque histoire doute de plus en plus du système qu’il a toujours connu et nous observons l’évolution, et les conséquences, de cette remise en question.

Pour vous résumer les histoires: 1984 raconte la vie de Winston Smith dans un monde totalitaire gouverné par Big Brother, dont la police surveille tout le monde, tout le temps, et même leurs pensées! Un groupe de rebelles (La Fraternité) s’oppose à ce régime et Winston essaiera de l’intégrer. 2084 se veut la suite: La Fraternité a réussi un coup d’état mais, au lieu de libérer le pays de la dictature, en a créé une nouvelle fondée sur la religion avec la figure divine de Yolah et de Abi, sorte de Messie. Ati, jeune pèlerin, tentera de comprendre d’où vient cette religion et ce régime.

J’ai adoré le livre de Orwell et je crois même qu’il est devenu l’un de mes romans préférés. Tellement prophétique et actuel que cela donne froid dans le dos. On a de vrais bouleversements, des twists, des personnages qu’on croyait bienveillants et qui s’avèrent être des pourritures… Tout cet aspect romanesque est d’autant plus appréciable que le fond est solide et pertinent. La théorisation de Orwell sur le totalitarisme et les fondements d’une dictature ouvre une réflexion sur le présent qui fait froid dans le dos! Rien qu’en réfléchissant sur le système de pensée de Big Brother, on se rend compte qu’Orwell tape dans le mille!

La guerre c’est la paix. La liberté c’est l’esclavage. L’ignorance c’est la force.

Orwell, 1984

La guerre c’est la paix: en maintenant son pays en état de guerre, la sécurité intérieure est assurée Tout le monde a un ennemi extérieur commun et toutes nos peurs ou notre colère sont dirigées vers ce danger. Donc toutes les décisions que peut prendre le gouvernement sont acceptées, dans le cadre de cette guerre. D’où la paix.

La liberté c’est l’esclavage: en étant esclaves par le travail ou même par la pensée, dans un état de soumission total au régime, nous serons en paix.

L’ignorance c’est la force: Big Brother a un ministère en charge de réécrire l’histoire. En changeant le passé, on peut ré-adapter le présent et créer une cohésion sociale. De plus, une langue créée par le régime, la Novlangue, supprime toutes les émotions des mots de manière à ce que ceux qui l’emploie ne soient pas tentés d’exprimer leurs réelles pensées. L’ignorance de l’histoire et de soi-même sont clés pour la pérénité du régime.

Dans 2084, ce que j’ai trouvé très intéressant, est que la Fraternité, alors qu’ils ont renversé Big Brother, va utiliser les mêmes méthodes que lui (réécriture de l’histoire, création d’une langue spéciale, culte de la personnalité…) pour mettre en place son propre régime autoritaire. L’originalité de l’oeuvre repose sur cette réflexion du culte et de l’extrémisme religieux, et sur la remise en question des dogmes. Si Sansal a tout de même glissé de l’optimisme dans son livre, 2084 est pour moi bien en dessous de 1984. Il y a beaucoup moins de réflexion en comparaison à Orwell et un aspect romanesque un peu moindre. Sansal étant un contemporain, il n’y a pas l’aspect visionnaire qu’on peut trouver dans 1984. Il faut rendre au génie d’Orwell un vrai hommage et Sansal n’a fait que puiser les idées chez lui pour son livre.

En avez-vous lu l’un des deux? Si non, courrez lire Orwell, vous n’en sortirez pas indemnes!

1984, George Orwell // 2084, Boualem Sansal

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